Perdue. Ou du-per, selon qui parle. Je commence à me demander si toutes ces envies de soumission ne sont pas le fruit de mon imagination. Si je ne me suis pas persuadée d'aimer ça pour fuir mon incapacité à désirer une relation normale. Le BDSM n'est rien qu'une autre norme, dans laquelle il peut être facile de se conformer pour ceux qui veulent paradoxalement échapper à la norme.
J'ai été frappée par mon refus de faire deux fois la même erreur. D'obéir à quelqu'un en appartenant déjà à un dominant. Je pensais que je ne serais jamais confrontée une nouvelle fois à cette situation. Je pensais que j'aurais le courage de partir quand je ne désirerais plus suffisamment mon dominant pour ne voir que lui. Alors cette fois je me suis retenue. Mais pour combien de temps ? Je suis peut-être en train de faire la même erreur au fond : celle de rester par peur de tout perdre.
J'ai tellement peur qu'on m'abîme et que je perde toute valeur que je finirai sûrement comme ces poupées de porcelaine en vitrine, sous des couches de poussière à regarder vivre les autres.
Je ne veux plus être cette utilitariste qui se saisit des plaisirs à sa portée. Je ne veux plus me servir des autres pour passer à autre chose. Je crois que j'ai déjà fait tellement preuve d'égoïsme que l'idée même d'y retourner me dégoûte. Mais je n'arrive pas à accepter l'idée de tout sacrifier non plus.
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Vous avez voulu savoir à quoi je pensais. Pourquoi soudainement j'avais l'air si triste ? La fin des choses me fait souvent de la peine mais je l'accepte. Avec vous, il a fallu que ce soit différent. Je n'accepte pas de savoir que vous ne m'embrasserez jamais. Que je n'aurai jamais à vous sucer. Que je ne pourrai jamais vous prendre dans mes bras.
J'aurais voulu que vous me forciez. Que vous me hurliez dessus de vous répondre. Parce que je vous appartiens. Mais je sais que ce n'est plus le cas. Je n'ai plus à vous obéir, plus à vous être soumise. Quand je dis "non", il n'y a pas de conséquence. Parce que c'est moi qui décide. Pour une fois, nous sommes sur un pied d'égalité et ça ne m'a jamais paru aussi difficile. Vous avez insisté pourtant. Mais je n'ai pas répondu, et vous l'avez accepté.
En refusant d'obéir, je coupe les quelques liens qui nous restaient. Mais je ne pourrai jamais me contenter d'être votre pute. Même si j'adore ça. Même si j'en jouis. C'est le plus douloureux des adieux. J'ai peur, mais personne ne va venir m'aider. Parce que la seule main dont j'ai besoin c'est la vôtre.
J'ai réfléchi longuement, à savoir si je souhaitais reprendre une relation avec vous. Je crois que la réponse est non. Bien sûr si vous m'en laissiez l'opportunité je le ferais. Je me jetterais à vos pieds pour que vous m'utilisiez encore et encore. Mais au fond de moi, je sais que je ne pourrai plus être heureuse dans cette relation que nous avions. Pas sans jamais se voir. Pas avec quelqu'un de 30 ans de plus que moi. Et pourtant, je vous aime, c'est vrai. Mais il n'y a plus rien à construire ensemble. On a tout détruit sur le passage. Il n'y a plus qu'à guérir nos blessures ensemble et espérer que nos chemins se sépareront sans un bruit. C'est la seule fin désirable que je peux imaginer aujourd'hui.
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Cette question ne me serait jamais venue en tête si des dominants (bien intentionnés, je le précise) n'avaient pas tenté de me dissuader à plusieurs reprises de devenir soumise sans avoir jamais connu d'expérience vanille auparavant.
Le fait est que pour plusieurs raisons, la plupart indépendantes de ma volonté, je n'ai jamais désiré avoir de relations vanilles dès l'instant où j'ai eu connaissance du type de relation qui m'intéressait vraiment. J'exagère un peu, ça a dû prendre deux ans en tout pour que j'en prenne conscience.
Tout ça signifie que je n'ai jamais eu le plaisir, l'honneur et l'avantage, de voir un mec de 20 ans poser ses jeunes pattes sur moi maladroitement. Je n'ai jamais eu ces premières caresses maladroites (pourtant les premières que j'ai reçues étaient tout aussi maladroites, un mauvais calcul) ou ces échanges de regard pendant les soirées. J'en serais probablement pour toujours privée, étant donné que les multiples sollicitations de ces dominants n'ont pas fonctionné.
J'ai tout à fait conscience du fait que quelque chose a débloqué chez moi pour que je sois conduite à désirer autant ce genre de fonctionnement. D'autant que ça n'a jamais pris l'allure d'un jeu. Je n'ai pas besoin d'être rassurée ou confortée là-dessus. C'est comme ça et j'ai accepté cet état de fait depuis pas mal de temps.
En revanche, je me retrouve à une étape clef de ma vie. Je viens de rompre d'une relation D/s très intense mais à distance. J'ai le choix d'abandonner ce monde pour faire ce que tout le monde croit bon pour moi. De me trouver un mari, de faire des enfants et d'être rattrapée au vol par la crise de la quarantaine et de me trouver en catastrophe un dominant pour calmer des pulsions qui se réveilleront soudain. Que personne ne m'en veuille si je décris sa situation, c'est plus commun que ça en a l'air, aucune honte à avoir. Ou alors, je pourrais persévérer dans l'erreur. Me trouver un autre dominant, qui ne sera sans doute pas un "bon" dominant parce qu'apparemment mon inexpérience fait fuir ceux qui auraient peur que la relation devienne abusive.
Mais que faire, alors ? Troisième option : devenir domina et me créer un harem de soumis. J'envisagerai cette option en cas de dernier recours.
Je me demande si au fond toutes ces bonnes intentions ne sont pas des excuses. J'ai peur de ce que je renvoie, de ce que je pourrais créer en m'abandonnant. Personne n'a envie d'être désigné responsable pour avoir brisé la cruche.
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