Je posais mon gros cul sur ma chaise de bureau en touillant mon pauvre café soluble attendant que le PC s’ouvre… a peine trois minutes de répit que la porte s’ouvre, laissant entrer Gabriel, le secrétaire administratif :
- Charlotte, on a un étudiant en lettres moderne qui a un souci avec ces partiels, est ce que…
- Envoie le moi, coupai-je, sans concession.
Quelques secondes plus tard, un jeune homme faisant son entrée dans mon bureau et me faisait arquer un sourcil d’étonnement. Il n’avait rien de l’étudiant type de cette face gaucho-pourrie qui me servait de décor 5 jours sur 7. De grande taille, le bonhomme avait de larges épaules, habillé d’une pelisse grisâtre. Il portait des bottes, un large pantalon de toile, son visage, rouge et possédant un nez massif, caché un air insaisissable et doux derrière des yeux vitreux indiscernable sous une paire de lunettes rondes imitant le bois. Ces mains gantées tenait un attaché-case brun, et sa chevelure rousse dissimulée sous une gavroche grise ne paraissait pas peignée. Et surtout, c’était l’odeur : un parfum d’herbe, mêlé à une eau de Cologne discrète et une odeur musquée émanant de chaque pores de ce corps blanc massif.
J’étais foutrement bouche bée devant cette carrure et cet air serein, intelligemment serein, qui rompait avec le « plein de certitudes stupides » des étudiants de la faculté et me laissait sans voix l’espace d’un instant.
Déstabilisation .
Le « Asseyez-vous » prononcé d’une voix enrouée était une preuve ridicule de mon désarmement. IDIOTE IDIOTE IDIOTE ! M’hurlais je intérieurement alors que je le voyais attendre sans se départir de son accoutrement.
- J’vous connais pas, nouveau à la fac ?
Une voix ronde, douce et ferme me répondait
- En réalité, je viens là, c’est singulier : j’ai perdu toutes mes notes de grec ancien. Je ne peux passer le partiel.
- Voyez ça avec votre supérieur, j’ai autres choses à faire !
- On m’a envoyez vers vous et…
- J’ai l’air d’avoir le temps pour ça ?
- On m’a loué vos qualités…
- Merveilleux, encore une fake news …
- Vous êtes photographe ?
- Qu’est ce ??
Du dialogue incisif qui s’instaurait je devenais le couteau à beurre, ramollie par la mention déroutante à une photographie d’un soleil couchant sur le Golfe du Morbihan. Je m’empourprais, légèrement décontenancée : ce jeune homme (mais était-il si jeune que ça) me tenait tête ? M’observait ? Ma poitrine se soulevait avec énergie.
Dommage pour moi, tant mieux pour lui, mon caractère de chienne revenait au galop.
- Bon, je suis pas le genre à discuter alors on va mettre les choses aux claires : je fais pas de passe droits aux étudiants. Désolé mais ce sera un zéro sur ton semestre. Je peux rien faire de plus. Maintenant ouste !
Le jeune inconnu se leva, sans paraître surpris ni choqué mais un rictus se dessinait sur le coin gauche de son visage glabre.
- Je vois…
Bras croisés, regard saoulé, je n’avais pas grand-chose à foutre de laisser ce gars dans la merde, comme tout les autres, mon boulot me gavait, j’étais là pour choper un salaire suffisamment cool pour dorer ma croupe sur une plage de Turquie, qu’est ce que j’en avais à battre de ces airs pour m’impressionner. Cœur de pierre Cul de velours… du moins le croyais-je.
- Si cependant vous appréciez la photographie… je m’y adonne et j’anime un club, au 18 rue Saint Clair… c’est bien là de la photographie amatrice. Votre photo est très nuancée, si il vous viens l’idée d’y faire un tour…
Le jeune homme posa une carte noire, à l’écriture dorée, sur le bureau, et fit demi-tour sans demander son reste.
Mon sang s’était comme figé à cette audace confrontant ma hargne irascible, et ma peau me picotait de curiosité.
De la nouveauté.
-Pfouuuuuuu
Soupirais-je en allant saisir du bout de mes doigts rongés la carte.
« Atelier VARLOT
18 rue Saint Clair ».
Suivit d’un numéro de téléphone unique.
Mes yeux verts allait tilter sur autre chose, transformant la curiosité en tentation. Incompréhension aussi, faiblesse suffisante à m’imposer une pause clope au bout d’a peine 20 minutes au boulot.
En bas de la carte, en illustration finale, une visage de profil, portant entre ces dents un mord à chevaux.
Mais c’est qui ce mec ?
Au moins, je savais où me rendre vendredi soir !
6 personnes aiment ça.

Nicolille
j'aime toujours ce ton un peu saccadé d'écriture, hate de lire la suite
J'aime
1
Il y a 10 heure(s)
maitre5457ma
maitre5457
l'épisode 1 plantait un "décor" ...qui " m'interrogeait" = vais je aimer ou pas... il faut avouer que le second pique ma curiosité et mon intérêt , avec de surplus une belle écriture.....bravo et vivement la suite

J'aime
1
Il y a 10 heure(s)
1 personne aime(nt) ça.