(pour faire suite au sujet sur la justice dans la soumission, parce que certaines réponses ne sont peut être qu'un problème de termes... (les deux textes ont été écrit il y a plusieurs mois de celà, à quelques semaines de distance))
Quel grand sujet à débat passionné et conversation houleuse que celui ci n'est ce pas !?
Bien évidemment, l'avis suivant n'est que le mien, n'est nullement présenté comme LA vérité absolue, et ne contient pas de jugement personnel. Par contre, il s'agit de MA vérité, et me concernant, je n'admettrais pas que qui ce soit veuille vouloir m'imposer son point de vue sur le sujet.
Je lis un peu tout et son contraire sur l'humiliation, les passionnés ne jurant que par les pratiques dites humiliantes mais sans s'engager dans le versant psychologique pour autant, ceux bien plus réservés sur le sujet prenant mille précautions, ou bien les fanatiques absolus ayant fait de l'humiliation la base même de leurs relations bdsm dans son entièreté.
En ce qui me concerne, je fais une profonde différence entre l'intention et l'apparence. Entre l'action et le ressenti.
L'intention, c'est lorsque l'on veut RÉELLEMENT humilier ou être humilié, en profondeur. Je ne m'épancherais pas sur cet aspect de la pratique, je ne le comprends absolument pas, et ne le recherche en aucun cas, ni en donneuse, ni en receveuse.
L'apparence, c'est lorsque l'on cherche juste à donner ou ressentir une impression d'humiliation mais SANS ressentir ladite humiliation au sens stricte du terme. Il est excitant dans ce cas de figure de braver l'interdit moral, souvent social, autour de la pratique, mais seule l'excitation du tabou brisé est recherché, en aucun cas le sentiment d'être profondément sali et bafoué au plus profond.
L'action, c'est l'acte de faire, c'est la mise en application de l'idée humiliante.
Le ressenti, c'est la façon dont est perçu l'acte et son application. Les deux, bien qu'étroitement imbriqués, sont pourtant indépendants, et ne dépendent surtout que de la vision de chacun.
Dernièrement, je me suis retrouvée à discuter humiliation avec une personne pour laquelle la pratique doit être ressentie et vécue au sens exact, elle avait besoin de se sentir humiliée réellement au fond d'elle même pour vivre son fantasme.
Et clairement, sur ce point, je bug complet. Il n'est pas entendable, dans MA conception, de pouvoir ressentir l'humiliation dans la réalité de ce sentiment. Une pratique dite humiliante n'est excitante que pour les interdits et tabous moraux et sociétaux qu'elle outrepasse, mais je ne puis l'accepter que de la part d'une personne en qui j'ai confiance et estime. Car je sais que cette personne ne me poussera jamais à ressentir ce sentiment désagréable et toxique de n'être qu'une sous merde.
Pour me pisser dessus, il faut avoir démontré le plus profond respect à l'égard de ma personne, et m'avoir prouvé que la protection de mon "ego", de ma sensibilité, fait partie des priorités.
Il n'est donc, de ce fait, pas entendable d'imaginer être poussée volontairement à la faute, et ce dans le seul but d'être humiliée sur mon absence de capacité à bien faire une tache, alors même qu'on la savait m'être de base impossible à cet instant. Pousser l'autre à la faute dans l'unique but de l'humilier ensuite est à mon sens une rupture du contrat de confiance, rupture mettant définitivement un terme à toute relation. Il ne peut y avoir d'estime, de confiance, d'abandon, avec une attitude pareille. Seul mon mépris peut répondre à une telle méthode.
Et cette vision vaut autant lorsque je reçois que lorsque je donne.
Ainsi, prochainement, j'aurais une esclave à ma disposition durant un WE. Je suis actuellement en train de lister les sanctions que je pourrais lui appliquer en cas de manquement aux règles. Sanctions dont elle aura préalablement été avertie. Action = réaction. Je ne prends pas en traitre, ce qui n'est pas dit n'existe pas. Ce qui est dit est appliqué.
Les sanctions n'ont pour seul but que de lui interdire d'aller volontairement à la faute par facilité. Elles me servent de catalyseurs, de garde fou, de barrière psychologique contre lesquelles l'esclave sait qu'elle va se bruler très fortement si elle ne fait pas attention à respecter les règles énoncées. Mais à aucun moment il n'est envisagé, ni envisageable, de lui rendre les choses impossibles pour pouvoir lui renvoyer son incompétence en pleine face.
Mon rôle est de lui offrir les meilleures possibilités, le meilleur contexte possible pour s’améliorer, donc l'entourer pour cela, en la cadrant, en la poussant, mais sans lui faire de croche pieds. A la fin du WE, je veux pouvoir lui dire ce que moi, j'aimerais entendre "je suis fière de toi, tu as dépassé mes espérances, tu t'es dépassée, tu es allée plus loin loin, plus haut, plus fort, tu peux être fière de toi même. Et en plus, nous avons aimé ça toutes les deux".
Si à la fin du WE, je venais à lui tenir un discours inverse, du type "salope, t'es vraiment une merde, une incapable, tu as tout raté, comme d'habitude, tu ne fais rien de bien", alors je perdrais immédiatement ma propre estime. Je ne mériterais pas la sienne, et encore moins sa dévotion. Je me mettrais de moi même à un niveau 100 fois inférieur à celui dont je l'accuserais.
Je ne pourrais jamais envisager la dégradation psychologique, la volonté d'humilier profondément l'autre, comme une chose normale et acceptable dans mes pratiques.
Dans le "pire des cas", si elle n'atteignait pas ses objectifs, la pire parole que j'accepterais de tenir (et d'entendre à sa place) serait l'expression de la déception ET l'ouverture à une évolution future : "je suis déçue, je pensais que tu parviendrais à le faire. Nous travaillerons donc en ce sens, et tu y viendras, parce que tu en es capable, et que je le veux".
Parce que la simple expression d'une déception de la part d'une personne à qui j'ai offert une part de moi même à travers la soumission est en soi d'une violence inouï. Je n'ai absolument pas besoin de plus pour déjà mal vivre l'échec. Aller plus loin dans les reproches, c'est chercher à me faire mal et détruire ma psyché. Or, mon BDSM ne peut en aucun cas être destructeur. Il ne peut qu'être elevateur pour les deux parties. Si l'une des parties faillies, l’autre a forcément sa part de responsabilité, car une relation est composée de deux personnes.
La communication obligatoire dans cette relation dépend des deux protagonistes.
Toute rétention d'informations, toute déformation de la réalité, toute omission, toute imprécision... impacte la communication et les réactions possibles découlant de cette dernière.
L'erreur ou l'échec de l'une peut fort bien être causée par une explication approximative de l'autre ou induite par une incompréhension. Et décider d'appliquer une punition à la suite d'un échec est également une façon d'humilier l'autre alors même que l'échec est déjà dévalorisant en soi à ses yeux. Et c'est donc, également, pour cette raison, que je refuse strictement d'entendre parler de punitions, encore plus lorsqu'elles sont décidées au petit bonheur la chance selon l'humeur du dominant et ce qu'il a avalé au petit dej'. = Injustice, bonjour... Et entre le sentiment d'injustice et celui de l'humiliation, il n'y a souvent qu'un pas très facile à franchir.
A contrario, la sanction est connue par avance, elle a été formulé au préalable comme conséquence logique en cas de manquement à l'objectif. Dans ce contexte, nul sentiment d'humiliation et d'injustice possible. Tout est safe, sous contrôle, correctement défini et cadré.
En clair : celui dont l'intention réelle est de m'humilier n'aura jamais mon estime. Il n'aura donc jamais ma dévotion. Il n'aura de ce fait jamais ma soumission.
J'aime les pratiques humiliantes en ceci qu'elles me permettent de montrer mon estime d'abord, ma dévotion ensuite, à qui j'en estime digne. L'uro, l'adoration des pieds, la contrainte... Mais le sentiment d'humiliation, lui, doit toujours être absent. Sans compromis possible.
Et c'est bien pour cette raison, pour ce besoin de confiance et d'estime mutuel, que je ne peux avoir de relation D/s avec le premier venu dès les premiers jeux. Comment s'assurer des intentions d'un inconnu ? C'est impossible. Seules la pratique et la connaissance de l'autre permettent de s'en assurer.