Voici un message posté sur Fetlife, par Port d’Attaches (profil https://fetlife.com/users/10420926 ), posté ici avec son accord.
Post original ici https://fetlife.com/users/10420926/posts/5870242#comment_24784948
Commencer le shibari : quelques recommandations pour les débutant·e·s
Ces dernières années, le monde du shibari connaît une immense expansion. Le nombre de pratiquant·e·s va grandissant, de façon quasi exponentielle. Et avec le nombre de pratiquant·e·s, également le nombre d'événements, de cours, d’enseignant·e·s, d’associations, d’organisateur·ice·s. Nous considérons que c’est une bonne chose : le savoir et les lieux de pratique sont devenus accessibles, les tabous s’estompent, les curieux et les passionnés ont davantage d’options pour trouver satisfaction.
Malheureusement, cette croissance rapide n’a pas laissé le temps à la communauté, trop enthousiaste, de s’équiper convenablement contre quantité de dérives. Personnalités manipulatrices, rapports de pouvoir malsains, comportements abusifs, misogynie et culture du viol, etc. Comme partout ailleurs dans notre société. À la différence près que notre pratique est par nature génératrice de fantasmes et de désirs, qu’on y intègre fatalement des jeux de pouvoir et de contrôle, et que les dérives sociétales et systémiques donnent souvent lieu à des abus de consentements, des violences physiques ou psychologiques, des agressions sexuelles, des viols. La prise de conscience progressive de ces dérives, les vagues MeToo ou BalanceTonPorc, ont libéré certaines paroles et depuis quelques années de nombreux scandales ont éclaboussé le monde des cordes, notamment à Paris. Avec virulence.
Port d’Attaches met un point d’honneur à apprendre de ces événement, à ne pas répéter les erreurs du passé, à se protéger le mieux possible de ces dérives, à identifier les comportements malsains ou malveillants pour les corriger ou les écarter, à prévenir et communiquer avec les pratiquant·e·s et la communauté.
Aujourd’hui, le message que nous voulons faire passer est le suivant : faites attention à qui vous confiez votre corps, vos émotions, votre intimité, votre esprit.
Deux choses à retenir : renseignez-vous et allez-y progressivement.
Nouveau·elle partenaire ? Nouveau lieu de pratique ? Nouvelle association ? Nouvelle·au enseignant·e ?
Renseignez-vous sur elleux. Auprès de pratiquant·e·s que vous connaissez, auprès d’une asso reconnue, dans un munch, au sein de votre communauté, sur un groupe dédié à ce genre de demandes et annonces sur Facebook ou Fetlife. Renseignez-vous sur les règles, le cadre instauré d’un lieu de pratique avant d’y aller. Renseignez-vous sur le style, l’approche, la réputation d’un·e enseignant·e ou d’une asso proposant des cours ou des workshops. Cela peut vous éviter d’assister à des pratiques que vous ne souhaiteriez pas voir, ou de vous exposer à des influences ou des discours que vous ne souhaiteriez pas entendre.
Certaines personnes travaillent seules pour proposer des évènements (cours, démo, etc.), parfois même à leur domicile. Les raisons de vouloir se tenir à l’écart de la communauté ou d’enseigner en petit comité peuvent être variées. Mais le fait est que vous pourriez vous retrouver dans un groupe très restreint, peut-être même seul·e face à l’enseignant·e, qui sur son terrain aurait une position d’autorité plus forte, avec tous les biais et les risques que cela comporte. Soyez d’autant plus vigilant·e vis-à-vis de ces propositions.
Partenaire inconnu·e ou méconnu·e ?
De belles photos ou une longue liste d’amis ne garantissent pas la probité de votre potentiel·le partenaire, loin de là. N’hésitez pas à faire votre première rencontre dans un contexte sans cordes, pour parler de vos envies, de vos interdits, faire connaissance et surtout vous faire une première impression sur la personne, sa communication, ses motivations. Le feeling, c’est important, peut-être que même sans un “red flag”, un élément dissuasif flagrant, vous vous rendrez compte que vous n’avez pas vraiment envie de confier votre corps à cette personne. Donnez rendez-vous dans un café, un munch, un parc fréquenté et tenez-vous en là pour le moment, laissez mûrir vos impressions et décidez d’un rendez-vous cordes plus tard.
Première session ?
Favorisez un lieu public, une jam, une soirée avec des ami·e·s. Ce genre de lieu ou événement n’étant pas toujours accessible, essayez d’organiser votre propre micro événement, par exemple invitez le·la à une soirée où quelques-un·e·s de vos ami·e·s seront aussi présent, chez vous ou chez elleux. Bonus spécial, pratiquer à quatre ou six dans un espace peut être une bonne source d’inspirations sans pour autant s’imposer une ambiance de groupe parfois trop encombrante. Ou bien emmenez juste une personne de confiance avec vous, pour faire des photos par exemple.
Définissez bien votre cadre de pratique. Vos envies, vos goûts, vos autorisations, vos limites, vos interdits. Mettez l’accent sur une certaine progressivité. Limitez-vous au départ à ce que vous connaissez, à une intensité moindre que ce que pourraient être vos fantasmes. Si tout se passe bien, vous aurez tout le temps de monter en intensité plus tard, de tenter de nouvelles expériences. Le shibari est une pratique relationnelle, et une relation doit prendre le temps de se construire, d’évoluer.
Mise en perspective
En écrivant ces lignes, nous nous imaginons nous adresser à des personnes curieuses et sans expériences, car ce sont ces personnes qui sont les plus vulnérables aux abus ou aux mauvaises influences.
Bien évidemment, il n’existe pas de charte de conduite absolue adaptée à tou·te·s, encore moins qui soit sans faille. Ces recommandations sont à prendre pour ce qu’elles sont : des recommandations. Tout ceci est à mettre en perspective selon votre vécu, vos expériences, vos désirs.
Dans le BDSM, on parle de “risk awareness”, la conscience du risque, et de consentement “éclairé”, informé. Informez-vous, prenez conscience.
L’équipe de Port d’Attaches réfléchit à comment créer des espaces d’échange pour aborder tous ces sujets, et en attendant, vous pouvez nous écrire, nous questionner, demander conseil, nous interpeller durant nos événements.
Pratiquez en toute conscience, posez vous les bonnes questions, faites attention à vous.
Dernière modification le 10/10/2019 20:12:15 par Elle.a.
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