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La Sublimation
"Freud définit la sublimation pour la première fois en 1905 dans Trois essais sur la théorie sexuelle1,2 pour rendre compte d'un type particulier d'activité humaine (la création littéraire, artistique et intellectuelle) sans rapport apparent avec la sexualité mais tirant sa force de la pulsion sexuelle en tant qu'elle se déplace vers un but non sexuel en investissant des objets socialement valorisés.
Autrement dit, il s'agit du processus de transformation de l’énergie sexuelle (libido) en la faisant dériver vers d’autres domaines, notamment les activités artistiques"
(Source wikip)
Longtemps j’ai culpabilisé de mes attirances vers le BDSM.
Basiquement, il est évident que cette pratique à contre-courant n’invitant à rechercher un épanouissement sexuel vers des plaisirs que la morale réprouve ou que la société moderne condamne, m’empêchait d'assouvir mes plaisirs avec sérénité.
Cette définition de la sublimation m’ouvre un début de réponse et quelque part, me rassure et me conduit un peu plus vers la découverte de moi-même.
Pourquoi cette attirance ? Mais demande-t-on à un peintre pourquoi il peint ? demande-t-on à un musicien pourquoi il joue ? demande-t-on à un écrivain pourquoi il écrit ? Non, on lui demande pourquoi son style, quel message a-t-il voulu exprimer, quelles étaient ses influences etc. Mais pourquoi le fait-il, non, on ne lui demande peu ou pas. Peut-être est-ce juste la nécessité de ne pas s’éteindre à petit feu, rechercher coûte que coûte à expulser, expirer avant de reprendre cet immense bol d’air qui nous soulage tant.
Et si mon BDSM était ainsi ?
Une simple démarche artistique me permettant d’assouvir, avec mes humbles moyens, cette quête permanente vers la plénitude.
Je me suis beaucoup interrogée sur le cliché réalisé qui accompagne cet article. Pourquoi cette mise en scène ? Après réflexions, derrière un cliché qui peut… heurter, j’y ai vu la mise en image de ce que mon BDSM m’apporte comme :
Avoir les pieds sur terre, même si cette terre se révèle être des petits cailloux aux bords acérés.
Ne pas baisser les bras, même si le découragement ou le relâchement seraient des solutions bien plus confortables.
Garder la tête haute, même si certaines situations ou certaines personnes vous conduisent à vous sentir comme une moins que rien.
Derrière ces expressions, derrière une première lecture que la morale réprouverait à coup sûr, se cachent les fondements de ma sexualité…
J’ai cherché à comprendre mon BDSM, j’ai expérimenté différentes facettes mais si finalement il n’était que ma part artistique enfin exprimée ?
Peu-importe sa forme, l’essentiel restant de la laisser s’exprimer, s’épanouir, jouir et me réjouir.
"Le Martyre est une sublimation, sublimation corrosive. C’est une torture qui sacre"
V.H
Posté dans: Techniques & Pratiques BDSM
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réflexions
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Virjiny
Je vous rejoins sur ce avant et après.
Pendant longtemps, j'ai parlé de mes deux facettes, l'homme à la ville, sans problème particulier, passant partout.
Et ce que j'ai appelé pendant longtemps mon "dark side".
Cette passion pour la sexualité qui m'a conduit vers le bdsm.
Le bdsm m'a permis de faire tomber cette barriere et de finalement unir toutes ces parties de moi en une seul et formant un tout unique.
J'ai également pris le temps de comprendre mon bdsm, comprendre qu'il y avait autant de possibilité que de personnes et qu'au final il est surtout pour ma part le résultat du couple que je forme avec ma compagne.
Tout ce chemin pour effectivement se construire, se connaître et tendre vers un épanouissement et un accomplissement.
Aujourd'hui, cela fait partie intégrante de moi, et je ne reviendrai pas en arrière.
Le bdsm me permet également d'appréhender la complexité humaine sans la juger.
Un moyen simplement de mieux vivre ensemble sans vouloir chercher à mettre des étiquettes et en se protégeant.
Merci pour ce sujet intéressant, en espérant qu'il donne envie à d'autres de s'exprimer sur leur ressenti.
Bonjour miangel, c'est le propre de l'homme de se poser des questions pour pouvoir avancer
Peut-être que l'humanité serait restée au stade primitif si nous n'avions eu cette insatiable curiosité qui nous pousse toujours à aller plus loin dans les découvertes
Même si parfois je me demande si cela n'aurait pas été préférable...
Je vous souhaite une belle journée
Bonjour Virjiny,
Pour ma petite contribution aux interrogations que véhiculent malgré nous les pratiques dites déviantes qui ressemblent sans aucun doute à des questions existentielles, permettez-moi d'éditer un extrait d'un petit texte sur le couple que j'ai pondu il y a quelques temps et qui semble rejoindre vos impressions:
-"je revendique une démarche plus cérébrale : c'est l'exploration de l'autre, minutieuse et auscultatoire ; se mettre à nu physiquement et mentalement, investir le champ de la fabrication de nos pensées les plus folles, libres de tout formatage, de tout acquis.
Livrer son corps en pâture, la belle affaire, mais livrer ce que l’on pense…
Tout au long de notre vie et dès le plus jeune âge, on nous dresse, on nous inculque, on nous apprend, on nous oblige, ainsi s’érigent nos pensées en compromis avec nos gènes et les référents que l’on nous impose. Cette éducation savamment distillée nous forge des armes et des atouts indispensables au « bien vivre ensemble ». Une fois grands, on s’empêche soi-même et c’est bien ainsi, même si cette école des frustrations par moment nous étouffe.
Mais il est un lieu, un pays où nulle de ces règles sociales ne devraient avoir cours, c’est celui de l’intime…
Ce laboratoire de la chair et de l’esprit mérite que l’on s’y attarde un peu: des pensées nommées désirs, fantasmes et autres obsessions y naissent et nous donnent le frisson !
Et si ces pensées sont les plus troublantes, c’est parce qu’elles sont le reflet de notre constitution originelle. Les exprimer, c'est se livrer, se mettre à nu corps et âme, c'est dire à l'autre, regarde ce que je suis, comment je fonctionne, comment je t'envisage et pourquoi tu m'inspires des idées parfois belles et sublimes, mais parfois aussi grotesques que saugrenues. Les partager, c'est se sentir moins seul en proie avec ces pensées qui nous traversent et dont nous ne sommes pas maîtres. C'est aussi l’accès à ce fameux "lâcher prise" bien connu de tous les adeptes du BDSM : fais de moi ce que tu veux, je veux t’appartenir, être ta chose, ton objet, je ne veux plus avoir à choisir, je mets ma vie entre tes mains. Lâcher prise social : j'oublie le poids de mes responsabilités professionnelles, familiales et de toute logistique relationnelle ; mais aussi, lâcher prise philosophique : je veux que tu compatisses à ma difficulté de vivre, que tu m'arraches de ma vie et que tu m'aides à envisager sa brève échéance.
D'où l’idée de la création de ce théâtre où nous sommes en même temps les acteurs, les spectateurs, les metteurs en scène et où nous mettons à disposition nos corps et nos esprits. Le second degré, indispensable pour éviter tout dérapage, garantit un dialogue où peu importe qui fait quoi, puisque les rôles sont endossés en même temps par les deux partenaires. Je te propose une action : je pose ma main sur ton ventre, ta passivité m'indique que tu adhères à ce geste, mieux encore, mon désir devient ton désir et c'est toi qui dicte tes limites. Ma main s’enfonce lentement, elle exerce une pression qui va crescendo, je m’émerveille de la texture de ta peau. Je te transmets mon émotion et comme mon désir est aussi le tien, tu es émue par la beauté de ton propre ventre. Tu te trouves belle dans mes mains, ce geste est une merveille tant il souligne cette mystérieuse sensation d’être vivant et à cet instant, toi et moi, c’est la même chose. Autrement dit, nous sommes à la fois l’un et l’autre (c’est chouette, moi qui rêve d’être dans la peau d’une femme), nous mettons à disposition nos chairs et nos esprits et nous nous laissons traverser par nos pensées brutes, les plus enfouies, les plus inavouables, révélatrices de ce que nous sommes vraiment. La frontière qui flirte avec le seuil de la douleur nous permet de dessiner précisément les contours de la sensibilité de l’autre, de le connaître, de le comprendre et donc de l'aimer. Le passif offre ainsi tout ce qu'il peut supporter, c'est un cadeau qui lui coûte, un signe d'amour bouleversant pour les deux, pour celui qui acte et qui ne veut pas que l'autre souffre et pour celui qui se donne et apprécie la beauté de sa propre générosité, de leur engagement commun, de leur subtilité d'âme.
La lenteur et la contemplation, la précision et l'auscultation méthodique nous font percevoir intensément chaque seconde de cette vie qui coule en nous. C'est la recherche d'un état de conscience qui ouvre les portes de notre inconscient, de notre moi profond, une sorte de méditation inscrite dans le temps, à l'écoute de nos respirations.
Ces deux cerveaux qui communiquent intègrent l'homme et la femme dans leurs spécificités individuelles, mais aussi l'homme au sens générique du terme.
On élargit ?
Ainsi, tu représentes la femme parmi toutes les femmes, l'homme parmi tous les hommes et tu m'émerveilles. Rien ne peut mieux me convenir sur cette planète que mon autre qui me ressemble.
Lui dire que je suis cet être humain unique de part son caractère et sa sensibilité, mais aussi, cet homme parmi tous les hommes, représentant de toute l'humanité, concevoir ensemble que nous faisons partie de cette famille des hommes, c'est imaginer que notre vulnérabilité et notre statut de mortel n'est plus tout à fait aussi insupportable. Prendre conscience que l’humain continuera après nous et qu’il intègre pour toujours une partie de nous, rendra peut être le passage plus facile. On peut rêver, non ? En tout cas, ça ne mange pas de pain et puis l’idée me semble si belle, si abstraite, si humaine qu’elle vaut bien toutes celles de toutes les religions réunies avec leurs histoires à dormir debout. D’ailleurs, n’admet-on pas bien volontiers la version de ce même rêve qui consiste à croire qu’un peu de nous vivra à travers nos enfants, argument enfoui en filigrane dans l’instinct de reproduction nécessaire à la pérennité de l’espèce.
La vie est éphémère, vulnérable, fragile, c'est pour ça qu'elle est importante et précieuse. Théâtraliser sa mise en péril est un exutoire qui en souligne la valeur et lui rend hommage. Notre inconscient nous pousse à la célébrer, cela donne une valeur ajoutée à chacun de nous, une estime de soi réconfortante.
Mais c'est aussi une façon de vouloir reprendre la main sur cette vie qui nous est imposée, de décider de notre sort. Nous sommes nés sans le vouloir, catapultés dans une vie où nous sommes prisonniers de notre identité. Impossible de changer, chaque matin, je retrouve ce même esprit dans ma boite crânienne. Se rebeller contre cette inéluctabilité, l'idée d'y mettre fin ou de défier cet ordre établi peut être libérateur, voire jubilatoire. Les pratiques dites déviantes offrent à ce titre des inspirations dont la palette est infinie, aussi complexe que celle que peut générer un cerveau créatif. Mais je me refuse à suivre les chemins, les dogmes et autres règles établies par je ne sais quels dictateurs, maîtres de pacotille, aux yeux desquels aucune autre voie ne serait légitime. Les scénarios imposés, les rôles gradés endossés définitivement par des charlatans auto-diplômés, les accessoires manufacturés et les règles pré-formatées ne garantissent nullement la connexion entre deux cerveaux. Sans cette connexion, rien n’existe et comme disait un certain Serge qui chantait plutôt pas mal, « l’amour physique est sans issue »…
Alors quoi, je cherche, je cherche cette femme, cette partenaire à inventer, cette évidence à réprimer, cette femme à la peau flasque et aux seins pendants, exprimant toute la fragilité bouleversante de cette vie si mystérieuse, cette femme à laquelle je me soumettrai, comme je me soumets à cette vie qui coule dans mes veines.
Eh ben c’est pas gagné, mais pourquoi pas par ici, trouver un esprit qui me corresponde.
J’affirme que nous sommes tous de grands philosophes, il nous suffit de nous en persuader !
Et l’homme-couple naîtra de ses propres réflexions, la plénitude engendrée par la fusion avec son autre lui ouvrira peut-être les portes du bonheur… Et je serai définitivement perché, mais j’ai bien peur que ce ne soit déjà le cas.