Méridienne d'un soir
par le 01/02/20
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Dans les films pornographiques, le SM sert de support à l'expression des fantasmes de puissance.
Sa mise en scène frise souvent le grand guignol. Pourtant, loin d'être une pratique fantaisiste, il traduit dans
la sexualité une tendance du psychisme à osciller entre domination et soumission. Qu'actualise-t-il ?
Quel en est le désir sous-jacent ?
Douleur et plaisir sont des sensations. Elles s'incarnent et permettent très tôt dans l'enfance de donner un espace
au corps. Celui-ci se construit comme espace sensible traversé de perceptions tantôt déplaisantes, tantôt plaisantes.
Le corps que nous sommes est initialement délimité par ces expériences. Le plaisir est tiré de la satisfaction des
besoins tandis que le déplaisir provient de leur frustration. Au départ, le plaisir est lié à la survie tandis que le déplaisir
indique une situation de danger vital. Il précède une possible disparition du sujet. Il se rattache donc à la mort.
Plaisir et déplaisir sont donc respectivement articulés aux pulsions de vie et pulsions de mort.
Le plaisir lorsqu'il survient recouvre la sensation désagréable précédente. C'est l'expérience d'une tension déplaisante
qui indique quel est le besoin à satisfaire : la faim, la soif, … Leur résolution procure du plaisir. L'expérience désagréable
est donc nécessaire à l'avènement du plaisir. Il est donc possible d'érotiser la douleur en prévision du plaisir qui viendra
lors de son apaisement.
De plus, le sentiment d'indignité à l'œuvre dans le masochisme rend possible l'émergence d'un partenaire qui viendra
le contredire. Le masochiste appelle donc un objet qui, en l'avalisant dans cette position, lui permet de prendre du plaisir.
C'est le masochiste qui crée le sadique, attirant sur lui ses foudres, le masochiste est en situation d'être porté et secouru.
Ce secours peut prendre la forme d'une punition. L'autre, même s'il punit, s'occupe du masochiste, il répond à une tension.
Cette structuration est explicite dans le troublant film de Michael Hanecke: " La Pianiste."
Lors des pratiques SM, nous percevons un passage à l'acte sexuel des tendances psychiques. La sexualité confronte
à des représentations du corps qui touchent aux couples propre/sale, bien/mal. Certaines parties du corps sont ainsi
honteuses et attirantes (sexe, anus)Toutes pratiques sexuelles oscillent alors entre attirance et dégoût, douleur et plaisir.
Dans le SM, cette alternance devient l'objet visé par la pulsion. La mise en œuvre sexuelle du masochisme réalise
le fonctionnement psychique inconscient. Cette tendance est universelle. Nous faisons tous l'expérience de certaines
douleurs ambigües jusqu'au plaisir: la petite plaie muqueuse sur laquelle on passe inlassablement la langue,
la petite peau avec laquelle nous jouons. Ces expériences révèlent notre attrait pour la douleur et la manière dont
nous nous en rendons maître. Posséder la douleur c'est s'autoriser à la transformer, à la renverser en jouissance.
Le sadisme a, lui, une connotation négative dans nos sociétés. Il réfère à un acte délictueux, là où le masochisme
correspond à une position de victime. Hors des situations pénalement condamnables, le couple sado-masochiste
est pourtant indissociable. Le sadique est convoqué par le masochiste qui détient le pouvoir. Il est maître de l'acte.
C'est lui ou elle qui fixe le début et la fin des hostilités. Le sadique n'est alors qu'un artifice, un outil du masochiste.
Il se plie à son besoin de soumission et le rend possible.
Les rapports fondés sur la force et le pouvoir voire la violence sont courants dans la vie quotidienne.
Nous les retrouvons dans de nombreux systèmes hiérarchisés (entreprise, milieu scolaire, famille, …)
Certains individus y sont dominés tandis que d'autres y sont dominants. La position adoptée dépend de la structure
névrotique des êtres. Celle-ci est toujours liée au pouvoir, c'est-à-dire au rapport au phallus, le détenir, l'envier,
le vouloir, le perdre.
Le SM n'est donc pas une perversion mais plus l'expression dans la vie sexuelle de mouvements inconscients
ordinaires. Dans une certaine mesure en mettant en jeu les désirs les plus profonds, ces pratiques pimentent
la sexualité et ne posent généralement aucun souci puisqu'elles sont fondées sur un profond respect et une écoute
soutenue de l'autre. En effet, le SM actualise et réalise une part des désirs inconscients informulés des partenaires.
Bonne lecture à toutes et à tous.
Méridienne d'un soir
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swanny33
Merci Méridienne d'un soir d'avoir amené un éclairage, nouveau pour moi, sur le SM . Je ne suis cependant pas totalement convaincue sur le fait que le sadique soit un artifice. Concernant l'idée de l'instrument, à mon avis cela vaut dans les deux sens. chacun a besoin de l'autre pour exister pleinement. Bonne soirée.
J'aime 01/02/20